Les enjeux géopolitiques de l'or noir au Moyen-Orient

Portrait de capitole

Qu’est-ce que le Moyen-Orient ? C’est un ensemble de pays hétérogènes par leurs pratiques religieuses, leurs situations politiques et commerciales. Certains sont riches à l’image du tout-puissant Etat qatari, d’autres ont leur population enfoncée dans la guerre et la pauvreté. Mais ce qui les réunit est la richesse de leur sous-sol : le Moyen-Orient, c’est deux tiers des réserves mondiales de pétrole et 40 % des réserves gazières.

le moyen-orient, au coeur des enjeux des hydrocarbures

Il n’est pas d’événement géopolitique, religieux ou social intervenant dans cette région qui n’ait un impact sur les équilibres économiques et politiques de notre planète. Une telle situation ne peut que susciter l’intérêt croissant des grandes puissances consommatrices pour ces hydrocarbures, dans un contexte où l’absence actuelle de solution pour remplacer le pétrole fait naître la volonté de conserver le contrôle à long terme des marchés.

Le Moyen-Orient peut se définir par son histoire, son rôle dans la naissance des trois grandes religions monothéistes, son influence sur la naissance des arts, des mathématiques et son influence sur la culture en général. Mais aujourd’hui son rôle essentiel appartient à l’exploitation des hydrocarbures de son sous-sol prodigieusement riche, qui détermine le bien-être de la société occidentale dans sa recherche de confort, de loisir. Malgré le développement d’énergies nouvelles comme le nucléaire et les énergies renouvelables qui sont toujours des énergies d’appoint, malgré les tentatives de diversification de l’approvisionnement en hydrocarbures dans l’Arctique, l’Alaska…le Moyen-Orient joue toujours un rôle essentiel et déterminant dans la consommation de pétrole de l’Occident, pétrole qui représente 60% de l’énergie consommée.

Peut-on se passer des ressources du Moyen-Orient ?

Aujourd’hui, se passer des hydrocarbures du Moyen-Orient reviendrait à supprimer du jour au lendemain 40 % des ressources pétrolières quotidiennes qu’utilise notre planète (10 % de ces besoins étant assurés par la seule Arabie saoudite), 11,5 % de nos ressources gazières et plus de 20 % de la valeur du commerce échangé quotidiennement sur les marchés internationaux. Il parait impossible dans ce contexte d’ignorer une telle région. Par effet papillon, n’importe quelle obstruction à la production du Moyen-Orient viendra peser sur le reste du monde. D’ailleurs, avec l’augmentation de la part du gaz naturel liquéfié dans le bilan énergétique mondial et le recul de la production d’anciennes régions productrices de pétrole, comme la mer du Nord, l’importance des hydrocarbures du Moyen-Orient ne peut que croître dans les prochaines années. Inutile de préciser qu’une fermeture temporaire du détroit d’Ormuz, quelles qu’en soient les raisons, se traduirait immédiatement par une mobilisation mondiale autour de l’enjeu de sa réouverture. L’utilisation de sous-marins de poche iraniens dans le détroit à des fins de blocage comme le laissait planer la menace du gouvernement iranien entrainerait l’intervention immédiate de tous les acteurs concernés, et pas seulement les Etats-Unis. L’Inde et la Chine sont les premiers consommateurs, et ont difficilement accès à d’autres sources d’approvisionnement contrairement aux Etats-Unis, eux-mêmes grands producteurs de pétrole.

La géopolitique des hydrocarbures au Moyen-Orient ne se limite toutefois pas à ce seul aspect d’une politique de préservation du bon fonctionnement des grands flux énergétiques de cette région vers le reste du monde. Elle est aussi et avant tout une question de niveau de production, d’investissement et de stratégies financières destinées à assurer à long terme un écoulement optimal des productions pétrolières et gazières vers les régions consommatrices.

Produire au Moyen-Orient, une obligation

Les scénarios les plus crédibles, entre autres présentés par l’Agence internationale de l’énergie (AIE), présentent le pétrole et le gaz comme les principaux besoins énergétiques mondiaux en 2015, respectivement à hauteur de 32% et 21%. Certains États restent des producteurs majeurs, en particulier l’Arabie saoudite, le Koweït, le Qatar ou les Émirats arabes unis (ÉAU). Tandis que d’autres comme l’Irak ou l’Afghanistan baissent en importance momentanée du fait de la situation politique agitée, cependant leurs réserves n’en restent pas moins cruciales.

Le Moyen-Orient reste la région de tous les superlatifs, avec en Arabie Saoudite le plus grand champ pétrolier du monde, celui de Ghawar. C’est dans le golfe Persique que se trouve le plus grand champ gazier mondial. Il est partagé entre le Qatar et l’Iran, et représente 20% des réserves mondiales. Toujours en Arabie Saoudite, on retrouve les installations les plus puissantes pour la transformation du pétrole, comme le centre de raffinage de Ras Tanura, qui possède une capacité de raffinage de plus de 30 millions de tonnes par an, soit le double de la capacité de la plus grande raffinerie française à Gonfreville-l’Orcher, près du Havre.

Au-delà de ces réserves et ces infrastructures gigantesques, deux questions clés s’imposent quant à l’évolution de nos pratiques énergétiques et de notre approche de la zone : avons-nous une technologie suffisamment avancée pour diminuer notre dépendance au Moyen-Orient ? Les récentes découvertes et les régions aux plus forts potentiels extérieures au Moyen-Orient peuvent-elles fournir une alternative crédible en matière d’hydrocarbures à ceux qui pourraient être produits autour du golfe Persique ?

Ces deux questions sont en effet au cœur de la problématique des hydrocarbures du Moyen-Orient. Les grands pays développés et les plus grands pays émergents sont à la recherche d’alternatives multiples aux hydrocarbures et pas seulement à ceux du Moyen-Orient. On peut citer la mise au point de bâtiments aux nouvelles normes, de l’importance croissante des agro carburants, des ampoules basse consommation, des voitures propres, du développement constant du nucléaire aux Etats-Unis et en Europe... Il y a en outre l’importance du changement climatique, dessiné une nouvelle fois au sommet de Copenhague avec la nécessité de diminuer la consommation en hydrocarbures pour diminuer notre production de gaz à effet de serre. Toutefois, les prévisions de toutes les institutions sont formelles : le monde restera dépendant aux hydrocarbures pendant encore 30 ans, horizon  auquel on pourra faire de nouvelles prévisions. Qui dit dépendance aux hydrocarbures dit dépendance au Moyen-Orient. Deuxième question clé, aucune région au monde ne constitue une alternative crédible aux hydrocarbures du Moyen-Orient pour trois raisons : il n’existe aucun champ pétrolier ou gazier (à l’exception de ceux de la Russie pour le gaz) qui puisse se positionner comme un concurrent sérieux. Les dernières découvertes off-shore au Brésil ajoutées à ce qui pourrait être produit en Arctique ne représentent au mieux que 10 % de ce qui existe au Moyen-Orient. De plus, l’exploitation de ces ressources est plus coûteuse car plus difficile. D’une certaine manière, le pétrole et le gaz affleurent au Moyen-Orient ; ce qui est fort loin d’être le cas dans le golfe du Mexique, comme l’a montré le récent accident de la plate-forme Deepwater Horizon de BP au printemps 2010. Le pétrole off-shore en Amérique ne se trouve qu’à des profondeurs très importantes, là où l’exploitation est malaisée. Enfin, les hydrocarbures non conventionnels comme les sables bitumineux du Nouveau Monde se présentent en quantités abondantes au Canada, aux États-Unis et au Venezuela. Ils représentent une solution attractive pour les pays les exploitant, comme le Canada qui a vu les prix du pétrole diminuer considérablement ces dernières années, mais à long terme et sur une échelle mondiale ils sont trop coûteux et trop difficilement exploitables avec une dégradation importante de l’environnement pour être considérés comme une solution de remplacement.

Abondants, peu chers, facilement accessibles, moins polluants que les hydrocarbures non conventionnels, ces hydrocarbures constitueraient un investissement idéal s’ils ne souffraient pas de deux handicaps majeurs : les changements géopolitiques et la volonté des Etats à produire.

Investir massivement au Moyen-Orient, est-ce possible ?

Contrairement au reste du monde, les familles dirigeantes ont placé les rentes et les décisions de l’exploitation des hydrocarbures entre leurs mains et celles des compagnies nationales. L’offre dépend donc des décisions des gouvernements. Or, vu les politiques énergétiques engagées dans de nombreux pays consommateurs pour faire face à leurs contraintes environnementales, les pays producteurs du Moyen-Orient s’estiment légitimes à limiter leurs productions en l’absence de vraies garanties des consommateurs leur permettant de maintenir leurs revenus à plus long terme. Dans cette région où 95% des budgets est alimenté par l’argent du pétrole, l’or noir représente la stabilité à travers l’armée, le gigantisme pour exprimer la puissance, et surtout pour des pays comme les monarchies du Golfe, faire naître la puissance de demain : achat de terres agricoles, programmes de recherche en médecine, investissements étrangers, développer le sport, le tourisme, la culture… Bref, l’or noir alimente le hard power comme le soft power. Le vrai défi pour les États du Moyen-Orient comme pour les pays consommateurs, au premier rang desquels se trouvent la Chine et les États-Unis, consiste à atteindre un équilibre entre l’offre et la demande satisfaisant les deux parties à long terme. La recherche du juste prix d’équilibre est d’ailleurs une constante de l’Arabie saoudite et de ses alliés du Conseil de coopération du Golfe au sein de l’OPEP (Organisation des pays exportateurs de pétrole).

L’Irak et l’Iran posent tous les deux le problème de la confiance, et à ce stade du débat sur le nucléaire iranien, le déblocage de la situation ne paraît pas imminent. Pourtant l’Iran dispose d’un potentiel de production considérable, de 6 millions de barils de pétrole par jour, alors qu’actuellement il n’en est qu’à 4,2 millions dont seuls 2,4 millions sont exportés. L’Irak produit 2,4 millions de barils par jour, dont 2 millions sont exportés, mais ce pays a le potentiel de produire 12 millions de barils par jour. Les guerres et la dictature de Saddam Hussein ont limité la production drastiquement, et sa reprise ne paraît pas imminente étant donné l’état de la stabilité politique du pays. 

L’enjeu des hydrocarbures du Moyen-Orient consiste à trouver la mise en place de la relance de la production de gaz et de pétrole pour répondre aux besoins énergétiques croissants, même si la nécessité d’une réduction de cette consommation à des fins écologiques s’impose.

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